92 – Le Voile

J’abhorre cette idée reçue selon laquelle le Voile est une sorte de « rideau » invisible séparant le monde des vivants de celui des esprits (qu’on lui donne pour nom l’Immatériel ou l’Après, vulgaire que « bon côté » ni de « mauvais côté » du Voile. Aucune description physique ne s’y prête, que ce soit celle d’une barrière ou d’un « mur radieux de lumière divine » (merci infiniment pour cette image, votre Perfection).

Non, franchir le Voile est plutôt comme ouvrir les paupières.

Avant de les ouvrir, vous voyiez notre monde comme vous le faites actuellement : statique, solide, immuable. Maintenant, vous voyez notre monde à la manière des esprits : chaotique, en perpétuelle mutation, un royaume où fantasmes et souvenirs ont autant, sinon plus de substance que la réalité. Pour un esprit, tout est défini par la volonté et le souvenir ; c’est la raison pour laquelle ils sont totalement désemparés en franchissant le Voile. Dans notre monde, l’imagination est intangible. Les objets existent indépendamment du souvenir que nous en avons et des émotions que nous y associons. Les mages possèdent le pouvoir de changer le monde par la force de leur esprit et peut-être est-ce pour cela que les démons sont attirés vers eux, qui sait ?

Quoi qu’il en soit, l’acte de traverser le Voile implique bien moins une transition physique qu’un changement de perceptions. Le Voile est un concept, c’est l’acte de transition en lui-même ; c’est seulement parce que vivants comme esprits ont du mal à effectuer cette transition que le Voile est vu comme une barrière physique.

— Tiré de la « Dissertation sur l’Immatériel en tant que manifestation physique » de Maréno, enchanteur de rang du Cercle de Minrathie, 6:55 de l’acier.

La Couronne de Cuivre