89 – Par-delà le Voile : esprits et démons

L’observateur non averti aura bien du mal à distinguer l’Immatériel des créatures qui l’habitent, sans parler des différents types d’esprits. En vérité, ces distinctions sont très subtiles, même pour les mages les plus perspicaces. Puisque les esprits ne sont pas des entités physiques et ne sont donc pas tenus de revêtir une forme donnée (voire une forme tout court), on ne peut jamais être sûr de ce qui est vivant et de ce qui fait partie du décor ; à ce titre, il est d’ailleurs conseillé au chercheur inexpérimenté de saluer tous les objets qu’il rencontre.

Nous avons souvent tendance à désigner, par le terme « esprit », les créatures inoffensives ou du moins peu offensives de l’Immatériel, mais en réalité, tous ceux qui résident par-delà le Voile sont des esprits. Comme le remarque le Cantique de la Lumière, tout ce qui se trouve dans l’Immatériel n’est qu’un reflet de notre monde ; un reflet maladroit, car les esprits n’ont pas la moindre idée de ce qu’ils copient, aussi une bonne partie de l’Immatériel ressemble-t-elle à un manuscrit traduit puis rétrotraduit du tévintide en orlésien par des initiés saouls.

En règle générale, les esprits sont tout sauf complexes, du moins en l’état actuel de nos connaissances. Chacun s’attache à une facette particulière de l’expérience humaine : colère, faim, compassion, espoir, etc. Cette seule idée devient leur identité. Nous appelons démons les esprits qui s’identifient aux émotions et idées négatives de l’esprit humain.

Le démon le plus commun et le plus faible que l’on rencontre dans l’Immatériel est celui de la colère. Ils ressemblent à des cocottes-minute toujours sous pression, qui n’existent que pour répandre la haine sans avoir forcément d’objet. Les démons de la faim sont un peu plus redoutables : ils ne font guère que manger ou tenter de manger tout ce qui leur passe sous la main, y compris les autres démons (la plupart du temps sans grand succès). Viennent ensuite les démons de la paresse, premières créatures intelligentes que l’on rencontre généralement dans l’Immatériel. Ils ne sont dangereux qu’en ces rares occasions où ils daignent faire l’effort de se lever pour nuire. Les démons du désir sont plus rusés et nettement plus puissants. Ils utilisent toutes sortes d’appâts pour attirer les mortels en leur royaume : richesse, amour, vengeance, selon ce que recèle le cœur de chacun. Les démons les plus puissants que l’on ait rencontrés à ce jour sont ceux de l’orgueil, peut- être parce que de tous leurs congénères, ce sont eux qui ressemblent le plus aux hommes.

Tiré de « Par-delà le Voile : esprits et démons » de l’enchanteur Mirdromel.

La Couronne de Cuivre