66 – L’Enclin

Pour grands que fussent leurs triomphes,
Les seigneurs-mages tévintides n’étaient qu’hommes
Condamnés à mourir.
Alors une voix susurra en leur cœur :
Allez-vous abandonner votre pouvoir
Au temps comme vulgaires animaux ?
Vous êtes seigneurs en ces terres !
Allez revendiquer le trône vacant
Des cieux et faites-vous dieux.

En secret ils œuvrèrent
Sort après sort,
À force de pouvoir et de vanité
Ils érodèrent le Voile
Jusqu’à tant qu’il cédât.

Au-dessus d’eux, un fleuve de Lumière,
Par-devant eux le trône céleste, engageant,
Sous leurs pieds
Les pas du Créateur,
Alentour un infini, infini
Silence.

Mais à peine avaient-ils esquissé un geste
En direction du trône vacant
Que tonna une voix
Qui fit trembler jusques aux fondations
Des cieux et de la terre :

À chaque pas que vous faites ici,
Ma Cité d’Or est souillée.
Admirez la perfection, car elle est fugace.
Vous avez porté le péché aux cieux
Et les ténèbres au monde.

Ils furent jetés bas avec violence,
Car nul mortel ne peut pénétrer en son corps
Dans le royaume des rêves,
Arborant la marque de leur Crime :
Une apparence si vile
Et pervertie que nul ne pouvait plus
Les prendre pour hommes.

Ils se retranchèrent dans les profondeurs de la terre,
Loin de la Lumière.
Au tréfonds des ténèbres ils partirent
En quête de ceux qui les appelaient,
Jusqu’à trouver leur précieux,
Leur dieu, leur traître :
Dumat, le démon assoupi. Leur souillure
Pervertit même le faux dieu, et celui qui chuchotait

S’éveilla finalement, parmi la douleur et l’horreur,
Et les mena à l’assaut des nations du monde :
Le premier Enclin.

— « Oraisons » 8.

La Couronne de Cuivre