313 – L’honneur du surfacien
Ce sot nous suit depuis trois jours, mais que puis-je y faire ? Sans doute un garde pourrait-il le mettre au cachot pour fieffée stupidité, mais aucune loi n’empêche d’aller au-devant de la mort dans les Tranchées. Ici, il n’y a aucune loi tout court. Je lui ai dit en le regardant droit dans les yeux que s’il mettait notre patrouille en danger, je l’écartèlerais moi-même ; mais je dois avouer qu’il se tient à carreau. Les surfaciens supposent généralement que la fin d’un Enclin efface les engeances de ce monde. Pourquoi celui-là s’inquiète-t-il que sa victoire les repousse à nos portes ? C’est une chose que de les affronter à la lumière, mais qu’il vienne à les combattre dans les ténèbres de leur tanière et il creusera son propre puits pour sortir d’ici plus vite… si le lyrium ne le foudroie pas avant.
— Extrait d’un rapport du lieutenant Gant, Légion des morts.
Je le jure, Mortavold, je n’ai jamais rien vu de tel. Cet… elfe… se battait comme un vrai possédé. Ses frappes étaient légères et ne résonnaient pas contre la Pierre comme celle des plus vaillants d’entre nous, mais il faisait montre d’une précision digne d’un Façonneur qui consigne ses mémoires. Parole, nous lui avons levé notre verre hier soir, et nous avons partagé nos histoires de famille et d’honneur. Avec un surfacien ! Au reflet du lyrium, il n’avait pas l’air moins à sa place que le meilleur d’entre nous. Je me prend à penser au cousin Bern. Je me demande ce qu’il devient à la surface. S’il nous envoie une autre lettre, j’ai bien envie de la lire. Les liens familiaux importent plus que l’endroit où nous commerçons.
— Tiré d’une lettre du caporal Trovid Oreson, date inconnue.
Puisse la Pierre accueillir ce surfacien comme s’il était l’un des siens. Il a beau être né à l’air libre, il a servi les Tréfonds mieux qu’un de nos fils. Beaucoup d’entre nous doivent leur survie à cet homme qui s’est battu à leur côtés et qui est tombé à leur place. Nous ne connaissons pas ses rites et je pense que la perte de son épée familiale risque de le contrarier dans son voyage – quel qu’il soit – mais il est pour nous comme un frère de sang et nous lui offrons ce qui nous est sacré. Willem Trialmont, si le chemin vers les tiens est sombre, la Pierre sera honorée de t’accueillir en son sein.
— Épitaphe de Willem Trialmont, 7:5 des tempêtes.
Il doit toujours en être un autre capable de prendre les armes contre les ténèbres. Tel est le véritable sens de la famille, le maillon fédérateur qui fera se succéder le jour à la nuit et offrira le repos aux défunts.
— Inscription restaurée, épée familiale Trialmont.