213 – Le premier Enclin – chapitre troisième

Le monde durant le premier Enclin était bien différent de celui que nous connaissons aujourd’hui. Hormis la tutelle civilisée de l’Empire tévintide, la race humaine était surtout constituée de tribus barbares disséminées qui s’entredéchiraient pour le contrôle des ressources. Parallèlement, à des lieues sous les grandes chaînes montagneuses de Thédas vivait une culture naine aussi organisée et évoluée que la nôtre était primitive.

Quand les engeances quittèrent leurs tanières souterraines pour affluer à la surface, les humains, d’abord rétifs, entreprirent de résister. Les armées tévintides s’évertuèrent à repousser les multitudes de créatures abjectes et l’immonde souillure des terres alentour, mais elles ne pouvaient se trouver partout à la fois. L’on se rappelle – à raison – le premier Enclin comme d’un temps d’inimaginable dévastation, mais nous péchons trop souvent par arrogance en oubliant le tribut que payèrent les nains dans leur royaume montagnard isolé.

Les nains affrontèrent des hordes autrement plus vastes que l’humanité, en rivalité directe avec eux pour le contrôle des souterrains. Malgré la puissance et la technologie qu’ils mirent en œuvre, les sauvages engeances enfoncèrent leurs rangs, détruisirent d’abord les thaigs les plus isolés avant d’engloutir des royaumes tout entiers. Ce fut toute une civilisation qui disparut en l’espace de quelques décennies. Face à ce qu’il convient d’appeler un génocide, ce que nous avons baptisé premier Enclin fait figure de simple escarmouche. Les territoires nains ont toujours subi le plus fort des combats et le plus gros des sacrifices.

Quatre royaumes nains parvinrent finalement à conjuguer leur puissance pour contre-attaquer ; ce fut cette coopération qui les sauva. Mais pour le reste des terres, il était trop tard. Les engeances s’étaient emparées des Tréfonds, ces majestueux passages souterrains qui couraient à travers les contrées naines de tout Thédas. Les engeances étaient maintenant à même de frapper partout à la surface.

De toute évidence, l’humanité n’était pas préparée à un tel assaut. Nos méthodes guerrières ne nous étaient d’aucun secours. Il nous fallait trouver un autre moyen de nous battre. Ainsi vint notre salut, sous le nom de Gardes des ombres.

— Tiré de « Ainsi tomba Thédas » de frère Génitivi, érudit chantriste.

La Couronne de Cuivre