204 – Histoire de la Chantrie – chapitre quatrième

L’assistance présente à l’exécution d’Andrasté avait raison de ressentir le désespoir. Il est dit que le martyre de la prophétesse courrouça le Créateur, qui tourna une fois encore le dos à l’humanité et laissa ceux de Thédas aux tourments des ténèbres.

En ces temps sombres, l’humanité recherchait désespérément une lumière, quelle qu’elle fût : pour certains, c’était le réconfort de sectes démoniaques qui leur promettaient pouvoir et richesses en échange de leur adoration ; d’autres imploraient le pardon des Anciens dieux et suppliaient les grands dragons de revenir ici-bas. D’autres encore en vinrent, perversion entre toutes, à vénérer les engeances en formant des sectes abjectes s’employant à exalter le mal dans sa forme la plus pure. Le monde, dit-on, versa des larmes car ses habitants imploraient un sauveur qui jamais ne vint.

À la mort d’Andrasté, toutefois, ses disciples n’abandonnèrent pas ses préceptes ; après son exécution, ils récupérèrent ses cendres sacrées qu’ils emportèrent en secret dans un temple caché. L’emplacement de ce dernier a disparu dans les limbes de l’Histoire, mais les cendres d’Andrasté restent le symbole de la foi inébranlable envers le Créateur, et du pardon que l’humanité peut encore espérer malgré l’affront qu’elle a commis.

Au fil du temps, le culte d’Andrasté s’étendit et prospéra jusqu’à donner naissance au Cantique de la Lumière. Chantez ce Cantique aux quatre coins de Thédas, disait-on, et le monde gagnera enfin l’attention du Créateur. C’est ce chant qui valut au culte d’Andrasté le nom de Chantrie andrastienne. Ceux qui embrassaient les croyances de la Chantrie recevaient pour mission de répandre la bonne parole d’Andrasté.

La Chantrie fit bien des convertis, y compris de puissants noms de l’Empire et des cités-États qui forment aujourd’hui Orlaïs. La parole du Créateur était telle que le jeune roi Drakan entreprit une série de Marches exaltées afin d’unir les cités-États et créer un empire tout dévoué à la volonté du Créateur. C’est ainsi que l’Empire orlésien devint le siège du pouvoir chantriste, la grande cathédrale de Val Royeaux la source du mouvement dont découle notre Chantrie moderne. Drakan, devenu entre-temps empereur Drakan I, créa le Cercle des mages, l’Ordre des templiers et l’office sacré de la Divine. Bon nombre de chantristes le placent pratiquement sur un pied d’égalité avec Andrasté.

La Chantrie moderne est l’admirable garante de la foi, mais c’est aussi une œuvre nécessaire qui protège Thédas des puissantes forces cherchant à lui nuire. À l’instar des Gardes des ombres, qui protègent le monde des Enclins, la Chantrie protège l’humanité d’elle-même. Plus encore, la Chantrie se consacre à mériter le pardon du Créateur, afin qu’un jour Il retourne et fasse du monde le paradis qu’il devait être.

— Tiré de « Ainsi tomba Thédas » de frère Génitivi, érudit chantriste.

La Couronne de Cuivre