113 – Arlathann – 2ème partie

Qu’est-il advenu d’Arlathann, me demandez-vous ? Las, nous n’en savons rien. Même nos dépositaires du savoir d’antan ne possèdent aucune archive à ce sujet. Nous ne disposons que de comptes-rendus des jours avant la chute et d’une fable évoquant le bon plaisir des dieux.

Le monde humain changeait alors même que les elfes sommeillaient. De clans et tribus épars était né le puissant Empire tévintide qui, pour une raison inconnue, partit à la conquête d’Elvhenan. Quand ils envahirent la grande Arlathann, notre peuple, redoutant la maladie et la perte de son immortalité, décida de fuir plutôt que de prendre les armes. Fort de sa magie, de ses démons et même de ses dragons, l’Empire tévintide marcha sur Arlathann sans rencontrer de résistance, détruisant demeures, galeries et amphithéâtres millénaires. Les nôtres furent parqués comme des esclaves et la promiscuité avec les humains accéléra leur métabolisme jusqu’à tant que chaque captif devînt mortel. Les elfes invoquèrent leurs dieux, mais en vain.

Nos ancêtres ont laissé la légende suivante pour expliquer le silence des dieux : Fen’Harel, le grand loup, seigneur des duperies, approcha les dieux du bien et du mal pour leur proposer une trêve. Les dieux du bien acceptaient de s’isoler dans les cieux, ceux du mal de s’exiler dans l’abîme, pour ne jamais plus pénétrer en terre adverse. Mais les dieux ne savaient pas que Fen’Harel comptait les trahir ; lorsqu’ils s’aperçurent de son stratagème, ils étaient confinés dans leur royaume, incapables d’interagir avec le monde des mortels. À n’en pas douter, il s’agit d’une fable, mais les elfes qui voyagent dans l’Après affirment que Fen’Harel hante toujours le monde des rêves pour veiller à ce que jamais les dieux ne quittent leur prison.

Toujours est-il qu’Arlathann était tombée devant ces mêmes humains qui n’étaient que vulgaires nuisibles aux yeux de nos ancêtres. Il est dit que les inquisiteurs tévintides usèrent de leur immense pouvoir destructeur pour forcer le sol à engloutir Arlathann tout entière, au mépris d’éternités de connaissances, de culture et d’art. Tout le savoir des elfes n’était plus que souvenirs.

— « La chute d’Arlathann », d’après la tradition orale de Gisharel, Archiviste du clan dalatien Ralafeïrin.

La Couronne de Cuivre