3 – Archidémon

« Au tréfonds des ténèbres ils partirent

En quête de ceux qui les appelaient,

Jusqu’à trouver leur précieux,

Leur dieu, leur traître :

Dumat, le démon assoupi. Leur souillure

Pervertit même le faux dieu, et celui qui chuchotait

S’éveilla finalement, parmi la douleur et l’horreur,

Et les mena à l’assaut des nations du monde :

Le premier Enclin. »

— Oraisons 8:7

Les faux dieux-dragons de l’Empire tévintide sont enfouis dans les profondeurs de la terre, où le Créateur les a emprisonnés.

Nul ne sait ce qui pousse inlassablement les engeances à chercher les Anciens dieux assoupis. Peut-être est-ce l’instinct, tel le papillon de nuit qui s’approche de la flamme ; peut-être un vestige de haine envers ceux qui ont incité les inquisiteurs à prendre les cieux d’assaut. Quoi qu’il en soit, lorsque les engeances trouvent l’un de ces anciens dragons, celui-ci est immédiatement affecté par la souillure : il se réveille perverti, vicié, et entraîne les engeances dans une invasion à grande échelle. Ainsi commence un Enclin.

Voici Urtëmiel, jadis dieu tévintide de la beauté. Dans les anciens temps, il était vénéré des musiciens, des artistes et des poètes. Le Banquet d’Urtëmiel, du haut de ses douze jours de libations, était la fête la plus somptuaire de l’année. On écrivait des pièces et des symphonies entières en son honneur. Aujourd’hui, ce n’est plus qu’une coquille vide, démente, que n’habite plus que le désir de détruire toute vie.

Quand éclata le premier Enclin, de nombreux hommes et femmes se jetèrent courageusement face à Dumat pour lui porter l’estocade. Mais aussi nombreux fussent-ils, aussi puissants fussent-ils, le dragon revenait encore et toujours. Certains y voyaient la preuve de sa divinité.

Les gardes des ombres, cependant, comprirent bientôt qu’il n’en était rien. Leur sang souillé les liait à l’archidémon : ils l’entendaient, le ressentaient qui mourait et renaissait, attiré par la créature souillée la plus proche. Les engeances étaient sans esprit, sans âme, de simples enveloppes de chair qui pouvaient sans difficulté être façonnées à l’image du dragon. Mais un homme… L’âme d’un homme était moins malléable. Lorsque la main d’un Garde des ombres donna le coup fatal à Dumat, l’esprit de l’Ancien dieu fut aspiré, non par une engeance, mais par l’homme qui l’avait occis. Alors, l’âme du Garde des ombres comme celle de l’archidémon furent irrémédiablement détruites. Et le dragon ne se releva plus. L’Enclin était terminé.

La Couronne de Cuivre