96 – La Longue marche

Quand notre peuple quitta Tévinter, nous n’avions rien hormis l’assurance que pour la première fois depuis des siècles et des siècles, nous étions libres.

Shartan avait pour rêve de nous donner à tous une terre d’attache, où nous pourrions vivre selon notre gré. Après la grande lutte qui coûta la vie à tant d’entre nous, y compris Shartan, nous reçûmes la Dalatie. Qu’importait alors que cette terre fût au sud d’Orlaïs, bien loin de Tévinter ? Notre foyer nous tendait les bras. Et nous partîmes à sa rencontre.

Nous donnâmes à notre voyage le nom de Longue marche, car il était bien tel. Nos maigres possessions en baluchon, nous avions pris la route. Certains n’avaient pas de chausses, mais ils marchaient néanmoins. Familles entières, femmes enceintes, jeunes et vieux sans distinction avaient tous entrepris de traverser à pied le pays. Ceux qui ne pouvaient marcher, nous les portions quand nous le pouvions ; dans le cas contraire, nous les abandonnions.

Nombreux furent ceux qui périrent en chemin, certains de fatigue, d’autres de découragement. Beaucoup furent assaillis par des bandits humains, alors même que nous ne possédions rien. Au gré de la route, les voix s’élevaient en nombre croissant contre notre décision de quitter Tévinter. « Au moins, à Tévinter », disaient-elles, « nous avions de la nourriture, de l’eau et un toit. Qu’avons-nous ici ? Rien d’autre que le ciel, et les fausses promesses de l’horizon. » Certains s’en retournèrent vers Tévinter. Mais la plupart d’entre nous poursuivîmes.

Et nous qui n’avions pas baissé les bras, les dieux nous récompensèrent de la Dalatie. Notre peuple nomma sa nouvelle cité Halamshiral, « la fin du voyage ». Et pour un temps, ce fut notre foyer.

— D’après la tradition orale de Gisharel, Archiviste du clan dalatien Ralafeïrin.

La Couronne de Cuivre